Des révélations nouvelles faisaient état d’une augmentation du bonheur dans des zones cartographiées par l’Industrie, ce que vérifièrent expérimentalement en juin 2020 les envoyés du premier et second contingent, mais lors de l’analyse constrictive la difficulté porta sur la reprogrammation des satellites de télémétrie qui opéraient le comptage des individus de la zone requalifiés par la machine centrale d’ ”unités bonheur”: que devenaient-ils lorsqu’ils franchissaient les limites de la zone? Etaient-ils ou n’étaient-ils plus des “unités bonheur”?
Mois : septembre 2021
Désherbant
Mes idées sont organisées et en relation, dans le raisonnement ascendantes ou descendantes, et je peux à tout moment fixer leur architecture comme si je détaillais une plante qui bien poussée se tenait devant moi; que Gala appelle, me parle, m’houspille, demande et nie, et il en est fait de cette architecture — la plante avec ses ramifications, ses nœuds et leur bourgeons les idées, sous l’accès de l’émotion et du désordre amoureux, tout succombe.
Chimpanzés
Vingt ans, plus peut-être, que je prends note de cette même idée, autrefois folle désormais réelle, que les argentés de la planète, sectaires congénitaux, dans leur délire de pureté, chercheront la fuite hors des espaces sublunaires et tenteront de se projeter dans l’éther, ce qui en dit long sur la conformation nubile de leur caractère.
Géométrie
Un problème surgissant ici, les gouvernements le déplacent là. Les manières de faire sont multiples. Soit par la parole, la promesse, moyens légers; soit par la police, l’administration, moyens lourds. Déchets nucléaires à enfouir? “Nous allons les mettre ailleurs”. Acte s’ensuit — ou pas. Campement de zombies drogués? “Nous les transférons vers un autre quartier”. Acte s’ensuit- de là, on les remettra ici. Motif secret des Droits de l’homme: ces “Droits” inapplicables inhibent toute action sensée en faveur de l’humanité souffrante.
Notoriété
L’excellent Gabi Delgado, anciennement DAF, grand défricheur de la musique électronique, mort dans son jardin au Portugal il y a deux ans, a 10 fans sur les réseaux de diffusion sonore des multinationales. Réputation, notoriété, célébrité, gloire, et dans le sens inverse, selon la courbe du temps.
Vélo
Parti le ventre noué. Cent-cinquante kilomètres et deux kilomètres et demi de montée, cela semblait beaucoup, cela semblait trop. Ce qu’il s’agissait de vérifier: est-ce trop? Noué, dis-je, car avant de revenir à son point de départ, on s’en éloigne. Or, si d’aventure j’avais la fringale ou m’épuisais, trouver le moyen de rejoindre la voiture autrement qu’à vélo serait difficile — la contrée est déserte. A Ansó, un berger court derrière le vélo. Il me déconseille de poursuivre, “la route de Zuriza s’est éboulée!”. J’insiste. “Vous ne passerez pas, il m’a fallu grimper dans la montagne”. J’emprunte un détour. Cela rallonge le parcours , mais le berger m’a rassuré: il a énuméré des noms de villages avant de conclure “juste après, c’est la France”. Les cyclistes le savent, il faut se méfier des automobilistes, ils ne connaissent pas leurs distances. Effet porteur cependant, je suis rassuré. Et bien sûr, dois me rendre à la réalité: là où le berger annonçait 9 kilomètres de col, il y en a 33. Milieu d’après-midi, j’atteins la frontière. Sous les nappes de brouillard, un troupeau de vaches barre la route. Je zigzague. Plus loin, des chevaux. Côté français la station de ski de La-Pierre-Saint-Martin. Lieu que je reconnais, nous y sommes venus avec Monfrère en 2015, alors que nous roulions devant le peloton du Tour de France. Je mâche des figues, avale une rasade d’eau, passe un coupe-vent et me lance dans la descente. Ensuite, long plat. Le vélo tourne à quarante à l’heure. Je me répète: trop vite, tu vas caler. Je ne cale pas. Au pied du dernier col, je me répète: tu vas caler. Je ne cale pas. Fin de journée, je retrouve la voiture. S’il y avait beaucoup, il n’y avait pas trop et dans tous les cas moins que prévu: 100 kilomètres de distance et quelque deux kilomètres positifs.