Mois : juillet 2021

Sommet

Très rich­es cap­i­taines du cap­i­tal­isme d’af­faire qui veu­lent con­quérir l’e­space à bord de boîtes de con­serve de fab­ri­ca­tion maison.

Madrid 2

Com­ment résumer mieux le car­ac­tère des Espag­nols que par cette anec­dote? Près de la bouche de Métro Alon­so Mar­tinez, j’at­tends les enfants. Devant moi marche lente­ment, penché sur son télé­phone, un jeune. Dans l’in­stant, il n’a sem­ble-t-il aucune notion de l’en­vi­ron­nement. Or, il se dirige vers un bus dont le chauf­feur main­tient la porte ouverte pour charg­er de pos­si­bles retar­dataires. Ayant jugé que le jeune est de ceux-là, mais qu’il va trop lente­ment, le chauf­feur lance sans impa­tience mais à force voix: “Te vienes ?”. Sur­pris, cher­chant qui l’a­pos­tro­phe, le jeune d’une voix plus forte encore: “No! Gra­cias hombre!”.

Madrid

Dans les beaux quartiers de Madrid aux rues larges et claires, Goya, Cham­berí, Arguëlles. Les arbres sont verts, l’air est tiède, les con­ver­sa­tions partout. Peu de traf­ic, aucun touriste. Un été inhab­ituel: même sur la Gran Via, boule­vard kitsch de la cap­i­tale, on par­le espag­nol. En coulisse, partout où les vieilles bâtiss­es offrent un trou les Chi­nois rangent et comptent, mais eux aus­si vaque­nt lente­ment. Il y a quar­ante ans, je me prom­e­nais tous les mer­cre­dis, jour sans class­es, dans Madrid. C’é­tait mon plus grand loisir. Je mar­chais des heures, ne m’ar­rê­tais que pour deman­der un verre d’eau dans un bar. Vêtus de blanc, les garçons le ser­vaient avec des glaçons et une longue cuil­lère. La ville a changé. Moins que d’autres cepen­dant, les restes de la civil­i­sa­tion antérieure sont tou­jours là: kiosques de fonte, cafés gar­nis d’azule­jos, concierges dans leurs loges, aveu­gles cri­ant la loterie. Un com­merce sur trois est à l’a­ban­don, pour­tant cha­cun se com­porte si de rien n’é­tait (du moins ici, au cen­tre, côté ren­tiers). Puis cette chose étrange dont il serait trop long de tir­er une expli­ca­tion: quoique l’oblig­a­tion ait été lev­ée il y a un mois déjà, tous les Madrilènes vont affublés d’un masque. Tout à l’heure, une ravis­sante gamine masquée nous ouvrait l’ap­parte­ment de loca­tion. Il est immense, décoré de pein­ture mod­erne, pos­sède un bal­con à balus­tres qui donne sur une rue tran­quille. A son pied, sur un tréteau, les tables d’un restau­rant hup­pé. Un couloir de par­quet mène aux cham­bres. Les enfants s’ex­tasient sur le jacuzzi, la douche de mar­bre blanc, les hauts lits. Aus­sitôt finies les for­mal­ités, nous sor­tons explor­er. A une heure du matin, les gens sont tou­jours sur les ter­rass­es et boivent, et man­gent. Le lende­main, journée Aplo: il s’ag­it de lui acheter des cos­tumes deux-pièces en prévi­sion de son entrée chez Bucher­er. L’af­faire n’est pas sim­ple muni qu’il est d’un “code couleurs” désig­nant les nuances légales pour chaque élé­ment, pan­talon, veste, cra­vate, chaus­settes, chaus­sures — pour moi, je n’ai jamais lacé une cra­vate. Surlen­de­main, journée Luv: il s’ag­it de vis­iter des loge­ments étu­di­ants car elle com­mence une école de graphisme dans la capitale. 

An 2 (XXXXII)

La vitesse de dérive que le clan oli­garchique imprime au sys­tème doit être éval­uée selon sa capac­ité à rem­plac­er “le peu­ple qui lit” par “le peu­ple qui regarde”.