An 2 (XXXVII)

Les naïfs ou pour faire vieux jeu les Salauds de Sartre, dont cer­tains étaient encore hier matin des amis dis­ent: “rien ne change”, expres­sion indus­trielle qui recoupe l’e­spérance d’un “retour à la nor­male”. Etrange pour des gens qui ont été for­més comme nous le sommes tous à l’idée de pro­grès. Con­sta­tons que, sauf dans le para­doxe de Zénon, le truc de la flèche, rien n’est jamais immo­bile et que de mémoire humaine, rien jamais n’est revenu (pas même le Seigneur). Mais alors quoi? Se ras­sur­er en un tourne­main, voilà qui n’est plus de la naïveté, mais de l’im­bé­cil­lité. Dis­ons-le, per­son­ne ne sait prévoir. Donc anticiper. Je ne prévois pas, je n’an­ticipe pas. Pré­ten­dre le faire sig­ni­fie sim­ple­ment que l’on impose quelque chose à quelqu’un et que ce quelque chose, dès lors qu’on l’im­pose, est antérieur au moment de l’im­po­si­tion. Il suf­fit d’a­jouter : “je savais”. (les vac­cins sont sans rap­port avec le virus, il exis­taient avant lui). Si comme moi, comme vous, les imbé­ciles n’an­ticipent pas, c’est que nous sommes des per­son­nes bien faites mais lim­itées et que par ailleurs, étant à peu près sains, nous ne cher­chons pas à impos­er. Mais voilà, si je dis “imbé­ciles” en par­lant des naïfs c’est qu’ils répè­tent “rien ne change” alors que déjà — un coup d’œil suf­fit à le con­stater —  tout est changé.