Mouvement 9

En croisière, à tra­vers le temps et ralen­ti. Le régime est monas­tique, mais sans aucun égard pour le péché, que nous pra­tiquons, Gala et moi, à bonne dose : bois­son, cris, sexe. Pour ce qui est de l’ho­raire, une norme s’est instal­lée. Elle fonc­tionne sans oblig­a­tion, demeure quelque peu floue si l’on avait à l’e­sprit, à la façon d’un suisse-alle­mand, de la maîtris­er sur hor­loge, mais elle est, jour après jour, hon­orée: dix, onze heures, midi par­fois, le réveil. Long café, longue douche. Je prends ensuite les nou­velles de la presse de pro­pa­gande (la con­tre-infor­ma­tion est réservée au soir, il faut dormir sur ses deux oreilles), puis je m’isole. Un bureau est impro­visé dans la pièce annexe. J’y ai trans­porté la table du bal­con, un usten­sile de métal ven­du par les grandes sur­faces, ces com­merçants crim­inels: autant dire, à peine penché sur mon tra­vail, j’ai mal au dos. La volon­té aidant, j’en­quête sur Ne Win, Than Shwe, Pyiny­ma et Naypy­itaw, la cap­i­tale de la Bir­manie, sujet de mon prochain livre. Puis je rejoins mon nou­veau copain syrien, fils d’un cadre du régime de Bachar. Ensem­ble, devant le sana­to­ri­um à façade blanc sucre, nous don­nons une heure de suite dans le cross-fit, les pilates et le shad­ow (l’arabe est ama­teur de lutte), après quoi je reviens au krav-maga, dis­ci­pline qui demeure pour moi tou­jours aus­si énig­ma­tique et périlleuse, bref dis­ci­pline de Juifs. De retour dans l’ap­parte­ment Sir­ius, je passe à la bière et, for­cé­ment, trois ou qua­tre litres passés dans le corps, peine à trou­ver le sommeil.