Liliput

Mon­tre en main, je fais le tour Bulle-L’E­ti­vaz-Les Moss­es afin de savoir si je serai assez isolé là-bas, sur le haut. La route est ser­rée, ban­cale, les glis­sières sont proches. Rossinière est dans le trou, après quoi le paysage se dresse. A la sor­tie de la forêt, c’est le plateau de La Lécherette: j’aime — une endroit abstrait, non-situé. Sap­ins noirs, plaine claire. Des mamans poussent des traîneaux sur de la mau­vaise neige, emmi­tou­flés les goss­es s’ap­pliquent pour réus­sir leurs pre­mières descentes. Avant Les Moss­es, je met la Dacia dans le talus et tire de ma poche les annonces de maisons en vente. Comme il se doit, les ren­seigne­ments sont impré­cis. Sur la pho­to, une riv­ière, peut-être un ruis­seau. Les colonies de vacances, les cars fumeurs et les ran­don­neurs cachent l’ac­cès, bref, je ne trou­ve pas, et me voici au Sépey, vil­lage que j’ai décrit en 1999 dans Trois diva­ga­tions sur le Mont Arto. Je ne sais plus ce que j’en dis­ais, qui devait être roman­tique, aidé que j’é­tais par l’ef­fort de gravir la côte sur mon vélo à sacoches, mais je le trou­ve cet après-midi aus­si vau­dois que prim­i­tif, et Suisse, qu’on en juge: tan­dis que je cherche la “belle mai­son à façade bernoise de 1777 qui vous enchantera”, un polici­er bedonnant sort du poste de police cen­tral, amende deux voitures. Or, nous sommes dimanche. Plus tard, je suis chez Mon­frère, à boire et écouter sur son tourne-disque fraîche­ment acquis, des 45t de Dis­charge, Crass, GBH… et Liliput, le groupe de bernois­es, tou­jours aus­si solide trente ans après publication.