Le mercredi vient au village le poissonnier Oskar. Il dételle deux remorques sur la place, ouvre ses éventaires de fruits, légumes et utilitaires (de la farine au savon), et se juche au-dessus des poulpes et des crabes, des morues et des coques. Dans un frigorifique, empilées, les saucisses et les viandes. Pour annoncer sa venue, il klaxonne. C’est inutile. Les voisines savent. Sa ronde des Vallées occidentales est bien maîtrisée. Il est ponctuel. Au signal du Klaxon, je ne bouge pas. Car il y a un ordre de préséance. La doyenne du lieu passe la première, elle a 94 ans. Suivent la tenancière de notre bar, le “Lierde”, puis la paysanne et la femme du guide. Si je m’avance avec une demi-heure de retard, il n’est pas rare que j’attende encore, car ces dames discutent recettes et marée, neige et température, et surtout santé. Aujourd’hui, j’ai rempli mon cabas avec générosité afin de n’avoir pas à quitter Agrabuey avant le départ pour la Suisse dans huit jours. Trois gousses d’ail, un oignon géant, six tomates cœur-de-bœuf, deux cent grammes d’haricots, 12 œufs, un chou fractal, une laitue, dix patates, un concombre, un saucisson sec et des carottes on coûté 18 Euros.