Notes de voyage — 7

Dans les val­lées, des mou­tons que les chiens rabat­tent à mon pas­sage. Même à vive allure, j’en­tends les oiseaux. Ils chantent dans les bois, le long des pans de roche, au bord des lagunes. Plus bas, trois aigles volti­gent. Leur ombres dansent sur la route. Il y a des vil­lages ensom­meil­lés. Si petits que je crois les voir du ciel. Puis un col tortueux, une heure d’ef­fort. La récom­pense: pen­dant le même temps j’e vais en roue libre, je con­tem­ple l nature sans avoir à moulin­er. Le paysage monte aux yeux. A la fin, je fran­chis un pont médié­val jeté sur le Tage. L’eau est turquoise. Ce sont les sources de ce fleuve qui coule à tra­vers Tolède et le Por­tu­gal. Nu, je me baigne. Il me faut chas­s­er des araignées d’eau agroupées dans une poche de joncs. Le courant est glacé. Je plonge la tête deux fois, je crie. Un kilo­mètre plus loin se trou­ve Para­le­jo de las Truchas, que l’on quitte par une route éprou­vante, faite de trous plus que de bitume. “Cinq kilo­mètres en travaux”. Et au cinquième, “sept kilo­mètres en travaux”. Le vélo bon­dit et rebon­dit. Je jure. A Moli­na de Aragón, je me rends immé­di­ate­ment au Palace. Même cham­bre que l’an­née dernière. Habil­lé de mon mail­lot cycliste aux couleurs de l’Es­pagne et mes san­dales chi­nois­es, je m’in­stalle ensuite sur la pre­mière ter­rasse. A minu­it, je suis tou­jours là, mais à l’in­térieur, avec Pablo, le fils de la patronne, un acteur de séries télévisées qui verse de la bière, de la tequi­la, du Rio­ja et passe des cig­a­rettes, Juan, ivre, qui tan­tôt m’in­sulte tan­tôt clame son admi­ra­tion pour ce que je suis, ce que je sais, ce que je fais, et Palo­ma, une Grena­dine, qui danse le fla­men­co et du saison­nier arabe venu boire un café dit: ” on ne sait pas ce que veut ce “moro”, il entre tous les soirs, il est là, il ne dit rien, on ne com­prend pas.”