Dans le train rapide, la passagère qui se lève pour me faire passer. Je m’assois. Avant qu’elle ne se plonge dans la lecture (pour lui parler plutôt que pour parler du livre):
- La pluie jaune!
- Vous connaissez?
- Je crois. L’histoire d’un village abandonné? De son dernier habitant? Mais je n’ai pas lu.
- Ah!
- Il y a vingt ans, il en a beaucoup été question… autour de moi… ça se passe dans la région n’est-ce pas?
Ces points de suspension car je cherche ma pensée et parle selon les images, pour celles qui me reviennent.
- Dans le val de Tena. Un texte poétique. Je le lis pour la quatrième fois. Tenez, lisez la première page!
Je lis. Quelques phrases, je tombe sur le nom Sobrepuerto.
- Tiens! Je me suis garé sous ce panneau hier, j’allais faire de la peau de phoque. Mais je ne suis pas allé jusqu’au village.
- Moi non plus, j’aimerais, un jour.
Elle reprend le livre, se tait, je ne la dérange plus. M’apparaît alors ceci: il y a vingt ans, emmené par un professeur de Genève, avec d’autres étudiants, nous sommes allés dans ce village, nous avons marché dans les rues en ruines, nous avons traversé l’église effondrée, au pied d’un balcon le professeur a appelé et un vieillard est sorti, le dernier habitant du lieu, le personnage du roman La pluie jaune (La lluvia amarilla).