Préparation 3

Sanz de retour de Saragosse me dit qu’il y fai­sait vingt-sept degrés. Ici, à mil mètres, il en fait dix de moins, mais surtout ce sont ces pluies; elles vont, elles vien­nent, la terre ne sèche pas. Chaque fois que je m’in­stalle au jardin, les nuages fondent sur la val­lée, le ciel se brouille, il tombe des gouttes. Le temps de réu­nir ses affaires, c’est l’a­verse. Je pense à mon voy­age à vélo. Il y a deux ans, nous par­tions à la même époque d’Aveiro dans le nord du Por­tu­gal; mal nous en prit. Entre les neiges, les grêles et les tem­pêtes d’eau, nous avons eu froid, froid et froid, au point — cela ne nous ressem­ble pas — de renon­cer après 500 kilo­mètres. Nos habits avaient le poids d’une ser­pil­lère, dès les pre­miers tours de pédaliers, nous trem­blions. Pire, les routes étaient dan­gereuses. Sur les descentes, le vent qui souf­flait en rafale nous oblig­eait à ralen­tir, par­fois à marcher pour ne pas tomber dans les ravins (les vélos flan­chaient sous le corps). Après-demain, passée la pre­mière cordil­lère, la plaine sera chaude et ensoleil­lée — voilà ce que je me dis. Et aus­si: c’est l’Es­pagne, le mau­vais temps, oui, mais cela ne dure pas (en Suisse, sachant ces con­di­tions, je me retiendrais de pren­dre le départ).