Ode

Piron, qui toute sa vie cher­cha à faire val­oir ses bons mots auprès du pub­lic raf­finé, se repen­tit d’avoir dans un moment d’en­t­hou­si­asme, l’an­née de ses vingt ans, écrit son Ode à Pri­a­pe, poème où il met­tait allé­gre­ment bas le mythe de la sagesse philosophique :

…Socrate — direz-vous — ce sage
Dont on vante l’e­sprit divin;
Socrate a vomi peste et rage
Con­tre le sexe féminin;
Mais pour cela le bon apôtre
N’en a pas moins foutu qu’un autre;
Inter­pré­tons mieux ses leçons:
Con­tre le sexe il per­suade;
Mais sans le cul d’Al­cib­i­ade
Il n’eût pas tant médit les cons.

Mais voyez ce brave Cynique,
Qu’un bougre a mis au rang des chiens,
Se bran­ler grave­ment la pique
A la barbe des Athéniens:
Rien ne l’émeut, rien ne l’é­tonne;
L’é­clair brille, Jupiter tonne,
Son vit n’en est pas démon­té;
Con­tre le ciel sa tête altière,
Au bout d’une courte car­rière,
Décharge avec tranquillité.

Mais voyez ce brave cynique