En route pour le Nord de l’Espagne par Madrid et Guadalajara. Dans cette dernière, apéritif puis hôtel quatre étoiles, celui-là même où nous avons passé des jours d’été, il y a quatre ans. La bâtisse colossale est flanquée de colonnes néo-classiques, les balcons des chambres donnent sur une urbanisation abandonnée lors de la crise de 2008: au milieu des champs, un réseau de routes éclairé par des réverbères fantômes. Je me présente à la réception avec un chou, une demi-mangue et deux oignons, ce que j’ai sauvé de mon frigidaire. Pour le reste, contentement à profiter du luxe, et pour mieux en percevoir les effets, je me comporte comme un riche, je gare ma voiture à quelques centimètres du tapis rouge de l’entrée, change de chemise dans la partie salon de ma chambre, commande une Guiness au bar puis vais faire les boutiques au centre commercial. Plus tard, je reviens au bar et passe la soirée avec un couple d’Anglais originaires de Northampton. Lui, conseillé en sécurité sur les chantiers. Ce matin, il surveillait le déplacement aérien d’un conteneur d’acide, demain il s’envole pour Singapour. Je raconte notre été à Withburn, cette banlieue de maisonnettes rouges entre Glasgow et Edimbourgh.
-Whitburn! Mon pauvre! Ce qu’il y a de pire en Ecosse! Combien de temps?
-Vingt jours sous la pluie!
-Oh ça, dit la femme, voici que racontent les Ecossais: quand on fixe les collines et qu’on ne les voit pas, c’est qu’il pleut, quand on les voit, c’est qu’il va pleuvoir. Pour moi, j’adore Guadalajara!
-Première fois en Espagne?
-Oui.
Je me retiens de lui dire que c’est une des villes les moins gracieuses du pays.