Fin

Mis à la poste les man­u­scrits. Le bureau se trou­ve à la sor­tie vil­lage. Il est mar­bré, frais et famil­ial, ouvert  jusqu’à la nuit; entre trois et sept, quand le vil­lage dort, des gens atten­dent là des col­is sous le bras. C’est encore le matin, une dizaine de per­son­nes dis­cu­tent. Je tire une chaise et sors le livre que j’ai attrapé en sor­tant de l’ap­parte­ment, Un par­a­digme de Bil­leter. L’at­tente peut se pro­longer, je n’en ai cure; il y a des mois que je ne lis plus pour le plaisir. D’ailleurs, je suis mieux assis dans la salle de poste que dans ma chaise à roulettes qui, à force d’y pass­er six à sept heures par jour, s’est défor­mée — il fau­dra la met­tre à la benne. Les meilleurs moments depuis le début du tra­vail ne mars 2016 auront été le tra­vail sur l’es­sai autour de la ques­tion du libéral­isme l’été dernier à Munich et les mat­inées que je pas­sais à la plage, en jan­vi­er, sur la table de pique-nique, à ajouter des chapitres au roman; le temps le plus pénible, celui des cor­rec­tions. Alors le texte appa­raît pour ce qu’il est, mau­vais. Il donne du fil à retor­dre. Chaque phrase coûte, l’équili­bre men­ace de se rompre… C’est mon tour. Je passe au guichet, l’employé pèse la let­tre. Il demande Fr. 25.- Pour me mon­tr­er qu’il n’ex­agère pas, il tourne la bal­ance, indique le poids. J’achète une tru­elle chez un Chi­nois (voilà trois mois que je veux grat­ter les couleurs que les pein­tres ont lais­sé sur le ter­rasse) puis je vais chez les frères maraîch­ers. Lun­di, j’ai fait de la con­fi­ture d’abri­cots, aujour­d’hui je vais essay­er avec des frais­es. Je ressors avec des oranges, deux tomates cœur de bœuf et un kilo de cerise d’Alfarnate.