Détacher

Sans cesse j’imag­ine une lit­téra­ture sans accroche, détachée du poids de l’in­ten­tion. Nul doute que celui-ci ne se soit allégé (par rap­port au XVI­Ième?), mais il con­tin­ue de tir­er l’écrivain vers d’oblig­a­toires con­séquences. Les  ten­ta­tives de rup­ture vio­lente ont mar­qué le siè­cle révo­lu­tion­naire, le précé­dent, mais ni les potach­es tra­vail­lant le vit­ri­ol der­rière Jar­ry ni les adeptes automa­tiques de Bre­ton ni, dans l’autre con­ti­nent, le flux de con­science des hip­pies, mal­gré les génies embar­qués dans l’af­faire n’ont réus­si à pro­duire à la fois des textes délivrés et ren­ver­sant le réel (notant cela, j’ai un doute quant à la per­ti­nence de l’af­fir­ma­tion s’agis­sant de la fausse oral­ité des beats, ludions d’une élo­quente effi­cac­ité); ce qu’il faudrait, c’est une vaste orai­son, mot pro­duisant des dis­cours pro­duisant des mots, sans quit­ter du regard ce réel ter­restre pour­ri et inféodé au puis­sant organ­i­gramme de l’élec­tron­ique dans lequel cir­cu­lent nos corps rou­tiniers. Per­son­ne moins que moi ne s’est mon­tré capa­ble d’une telle prouesse, dia­bolique­ment infor­mé que je suis par les tel­luriques de l’in­vis­i­ble académie du rationnel qui enseigne à coups de matraque (mais le recevoir per­met aus­si de vivre dans une société de paix) que l’idée bien for­mée précède l’ex­pres­sion. Eh bien, je crois le moment venu de pass­er out­re. Don­ner dans la geste, pren­dre ses out­ils d’écri­t­ure pour les jeter devant soi. Il faut essay­er. Je vais essay­er. D’ailleurs, il n’y a pas un soir que je ne me couche en essayant, cela depuis dix, vingt ans même. Mais je réser­vais cette lit­téra­ture sans accroche et des moments mar­gin­aux, je les y cantonnais.