Immense ciel rose sur la ville. Le quai ressemble à une aventure sans fin. Les promeneurs baissent la voix. Dans cette lumière profonde, les silos du port ont la taille de dés à coudre. Incertains de l’heure, des jeunes gens sont assis à demi-nus sur des serviettes de bain. Près de l’Alameda, la grande roue est à l’arrêt. Ses nacelles éclairées sont suspendues sur l’horizon. La nuit monte tandis que je roule sur les trottoirs du Pedregal. Pour gagner de vitesse les voitures, je brûle les feux rouges. Elles me rattrapent, s’entassent, redémarrent. Sur la plage, j’aperçois l’enseigne du restaurant Pontegordo (deviens gros!), plus loin, la pépinière. Un couple discute devant un massif de cyprès. La route rétrécit, se love contre la falaise, longe la station-service. Je jette une œil au bâtiment d’habitation: il s’élève entre les pistes de la route. Qui peut vivre là? Au troisième étage, j’aperçois de la lumière derrière les stores. Tantôt, Raul m’a dit que c’était là son quartier. Quel quartier? C’est le chas de l’aiguille. Quelques kilomètres de plus et j’atteins la discothèque Para vernos mataos (pour nous voir entretuez-vous!). Son rideau de fer est baissé. La route tremble un peu et s’enroule autour d’un piton autrefois marin. C’est là que je bifurque. Le sentier est jonchée de cailloux. Mon phare éclaire un chien. Puis apparaît la cimenterie. Ses machines occupent toute une crique. Cheminées, hangars, tapis roulants s’agitent contre la nationale. Plus haut, la montagne entamée crache de la poussière, des grues sont accrochées au ciel. Au milieu, un tube géant tourne nuit et jour. Il ronfle et tousse. D. me faisait remarquer qu’on ne voit jamais d’ouvrier. En revanche, il y a des pique-niqueurs. Ils mangent dans la nuit. Au bout de la plage, campés sous des parasols publicitaires, observant leur lignes dont le fil se perd dans une mer d’encre, des pêcheurs s’apprêtent à dormir dehors.