Anxieux à l’idée de cette tribune libre que je me suis engagé à rédiger pour la revue Études. En cause, le “devoir”. Lundi, la fatigue due au sport et à l’alcool m’amène à repousser le travail. Mardi, je fais des repérages de mobilier urbain dans le quartier du Torry puis me rends à Lausanne pour une interview. Dès lors le temps presse. Dans quelque jours, Gala sera à Fribourg, puis les enfants ont leurs vacances d’octobre. Alors, impossible d’écrire en liberté. Or, c’est précisément dans cet état d’anxiété mêlé de devoir, que le texte, avant même la première ligne tracée sur le papier, prend forme mentalement. En fin de compte, en quelques heures de travail, en entrecoupé d’un dîner à la cantine universitaire où je ne vois rien de ce qui m’entoure, je boucle le travail. J’envoie, j’attends. La rédactrice est positive. Bien heureux que je suis! Elle s’exclame: jamais je n’aurai pensé recevoir ta contribution si vite, la publication est prévue pour février. Oui, lui dis-je, mais ensuite, mes livres seront sous carton, mon ordinateur déplacé, j’ai un examen de Krav Maga, un marathon à courir et un billet d’avion pour Kuala Lumpur. Ainsi rassuré, je me mets au lit. Pendant le sommeil se met en place le projet Gormiti: comment traiter d’une maladie qui ne se voit pas, n’existe pas, ne tue pas, et pourtant, a déjà tous les traits de l’épidémie? Au réveil, j’ai quarante questions, façon interview de sociologie, que j’imagine poser à des gens choisis au hasard dans la foule, ceux qui qui se baladent coupés du réel, scrutant les images que leur renvoient leur téléphone mobile, un casque d’écoute sur la tête, ignorant dans quelle ville, quel pays, quel espace ils se trouvent.