Sur des chaises basses, minuscules, colorées, pour enfants, devant un plat de riz et une bière Myanmar. La terrasse, organisée sur chape brute, éclairée par des néons suspendus aux arbres, donne sur le lac. Un restaurant chic. Les consommateurs arrêtent leur voiture avec ostentation, font jouer les phares. Puis toute la scène replonge dans le noir. Le service est assuré par une Chinoise au faciès de papier mâchée convaincue d’avoir décroché le meilleur boulot de la place. Passent alors sur le quai de poussière un paysan et ses deux filles. Les gamines ne sont pas plus grosses que des pastèques. Le panier de rotin que porte le père est sanglé à son front. Les trois vont pieds nus, l’air hirsute. Le paysan regarde devant lui, l’attitude craintive. Si je passais en sandales devant le Ritz lorsque les chauffeurs mettent le contact aux limousines, j’aurais la même attitude.