Messages que mitraille Tatlin sur mon portable. Expérience neuve. Elle répond à une question mais a posé entre temps une autre question, j’y réponds. Court-circuit qui crée un dialogue fou. Dans les interstices transparaissent de aveux. Il est ainsi plus facile de lui dire ce que je ressens: tu es étrangère et inabordable, tu fuis (elle a passé un an en asile et je suis un des seuls à qui elle parle dans Fribourg, il ne s’agit pas d’une simple affaire de flirt). Pourtant que fais-je d’autre que l’aborder, et cela depuis un an? Tout-à-l’heure je la croise au restaurant. Grands yeux, grande femme. Elle lit depuis le matin, me reconnaît à peine, tend la main, cherche à me situer. Nous échangeons deux mots. A croire que l’on en se connaît pas. Et maintenant, trente messages en quelques minutes: il est question de voyage, de Descartes, de neurolinguistique, de combats MMA, de vagabondage, d’amour. Dans ce monde mêlé de virtuel, nous ne sommes plus corps ni esprits mais amas moléculaires.