Retour de Détroit. Un travail littéraire au-delà de mes espérances et que je poursuis ces jours. Cette façon d’écrire est la mienne: j’arpente des campagnes ou des villes un carnet en poche, prend des notes sur les coins de table, dans les parcs ou au milieu de la rue et cela sans interruption, heure après heure, le jour comme la nuit . Alors peu à peu, la l’art et la vie se confondent, une sublimation est opérée. Le quotidien perd ses attaches matérielles la vie est esthétique. Pour l’esprit, c’est un immense bonheur. Le récit s’organise au gré des notes et dans son mouvement. Au fond, pour prendre un exemple chez les anglo-saxons, c’est le débat Henry Miller-Lawrence Durrel. Tout l’hiver, Etan m’a fait reproche d’une attitude froide, il entend cérébrale: elle pousse le texte vers le constat d’analyse. Cette effort de construction intellectuelle me fascine, il est certain, mais l’autre veine, lyrique et déambulatoire, est tout aussi passionnante. Et il y en a une dernière, qui relève de la fabrique, c’est à dire de la fiction brute, de l’agencement des phantasmes. Elle donne des romans ou des nouvelles. En regard des deux premières elle m’apparaît négligeable. C’est qu’on y apprend très peu sur soi. Le champ de l’imagination est trop vaste. Pour en revenir au livre écrit à Détroit, il me faut y ajouter quelques pages que j’ai à l’esprit puis rassembler et consolider l’ensemble. A moins que je me trompe, j’ai enfin réussi cet alliage précieux du trivial et du distingué, des choses du corps, la nourriture, la parole, les amitiés, l’amour et des choses de l’esprit, les vues spéculatives, la religion, la psychologie.