Fantômes

Villes fan­tômes aux envi­rons d’Ube­da. Le long de la route, en pleine journée, pas une fenêtre dont les stores ne soient bais­sés. Et posés sur les champs, acces­si­bles par des réseaux routiers neufs et aban­don­nés, des hangars, des fab­riques, des halles d’ex­po­si­tion, des mag­a­sins qui tous por­tent les mêmes inscrip­tions : en vente, à louer, à remet­tre. Plus loin un aéro­drome. La tour de con­trôle que tra­verse les rayons du soleil, des débris sur le tar­mac, des arbres tombés. Au loin, détaché con­tre l’hori­zon, des bar­res de vil­las mitoyennes. Vingt, vingt encore et encore vingt. Les pre­mières, inhab­itées, mais aux façades achevées, les autres, sim­ples squelettes. Si les hommes de gou­verne­ment n’avaient pas l’am­bi­tion d’être réélus en sus­ci­tant, sans regarder à la sit­u­a­tion, des prob­lèmes dont ils ont la solu­tion, ils pour­raient relancer l’ac­tiv­ité économique en sup­p­ri­mant le régime des indem­nités chô­mage. En con­trepar­tie de leur tra­vail aux champs, les jeunes seraient logés dans des maisons réqui­si­tion­nées. Cela per­me­t­trait de ren­voy­er les immi­grés africains sous-payés qui hantent les vil­lages et de créer une relance par la con­som­ma­tion. De plus il serait facile de faire val­oir auprès des pro­prié­taires agri­coles que l’ex­ploita­tion des clan­des­tins est com­pen­sées par le coût des impôts néces­saires au bon fonc­tion­nement des sché­mas de redis­tri­b­u­tion sociale. Au lieu de quoi, les jeunes se promè­nent, les grands-par­ents font vivre les familles sur leurs rentes, les par­ents viv­o­tent, le pays se métisse et s’en­fonce dans la récession.