Objets

Par­mi tant d’ob­jets acquis, reçus, égarés, il en est deux dont je me sou­viens avec ravisse­ment au point de retrou­ver, chaque fois que je les évoque les sen­sa­tions qui accom­pa­g­naient leur emploi. Un cassé­to­phone portable d’abord. En plas­tique gris, muni d’une anse et d’un récep­ta­cle où loger la cas­sette à bande, il com­por­tait un haut-par­leur inté­gré et qua­tre touch­es: play, avance, recul, stop. Mon père en avait fait l’achat pour ma grand-mère. Nous viv­ions alors en Fin­lande. Cer­tains soirs, mon père réu­nis­sait la famille et nous par­lions de notre vie. Puis la cas­sette par­tait par la poste en Suisse où ma grand-mère pou­vait l’é­couter sur le cassé­to­phone, ce qu’elle ne fit jamais faute de com­pren­dre l’usage des qua­tre touch­es. C’est ain­si qu’il finit par m’ap­partenir. Pou­voir jouer de la musique à volon­té fut une décou­verte. Cela se pas­sait en 1972, j’avais 7 ans et une seule cas­sette : The Great Glen Miller Band. L’autre objet, était mon pre­mier skate­board de série. Pen­dant des années, j’avais sculp­té des planch­es, vis­sé des roues, col­lé du papi­er de verre et soudain des mod­èles cal­i­forniens appa­rais­saient dans les vit­rines des mag­a­sins de sport de Lau­sanne. Or ma grand-mère con­nais­sait une vendeuse. J’al­lais donc un après-midi désign­er le mod­èle et cette amie vendeuse nous l’ap­por­ta après son tra­vail, en début de soirée, à l’av­enue d’Ouchy. Il était débal­lé car elle avait dû emporté le mod­èle d’ex­po­si­tion et dès que je l’eus en main je mon­tais dessus. La sen­sa­tion de gliss­er sur du velours ne m’a jamais quitté.