Plus d’une heure et demie de route par Charmey, Jaun et Boltigen pour gagner l’Obersimmental. Soleil radieux sur les cimes. Il est étrange que, parti du Lac noir, j’ai atteint ce lieu reculé. A Oberwil, nous demandons notre direction. J’engage la voiture de ma mère (petite, poussiéreuse, discrète) sur un chemin. Nous franchissons des barrières canadiennes, roulons sur le caillou, trouvons un chalet dans une impasse. Des habits sèchent sur une ficelle. Je frappe, j’entre. Les paysans sont aux champs. Nous redescendons en plaine. Je me renseigne. C’est le bon chemin, mais nous avons manqué une bifurcation. Un quart d’heure d’ascension. Au moindre écart de volant, la voiture finit dans le précipice. Gala admire, je me concentre. Apparaît enfin l’alpage où j’ai rebroussé chemin l’autre jour pour rejoindre le canton de Fribourg. Trois quart d’heures de marche jusqu’au plateau où je m’installerai. Gala veut renoncer. J’insiste. Elle m’accompagne. Un troupeau de chèvres remue dans la paroi. Je crois pouvoir cacher ma réserve de pâtes dans une fortin de l’armée, mais il sert d’étable. J’enveloppe les pâtes et veut les suspendre en haut d’un rocher, je les prends sur la tête. Je les enfouis dans un tas de pierre. J’écris mon nom et la date à laquelle je les mangerai. De retour à la voiture, je vais trouver l’armailli. Il trait une vache. Il porte la barbe, le costume, fume un bout de cigare. Il réfléchit: non, si vous venez le 10 septembre, il n’y aura plus de vaches. Je le remercie. Je m’inquiétais surtout de savoir s’il ne verrait pas d’inconvénient à mon installation.