Mois : mars 2011

Genève — rues arpen­tées des déchets soci­aux, des voy­ous, des stupé­fiés, des som­nam­bules. Retranchés dans les officines les fonc­tion­naires admin­istrent con­tre émol­u­ment l’or­dre appar­ent de notre “ville de paix”.

Retour des passereaux dans le soleil de mars. Ils s’en­v­o­lent du tas de sable qu’ils picorent effrayés par le chant du coq de Malfait.

Qua­torze bateaux de mille réfugiés tunisiens arrivés à Lampe­dusa ce matin. Autant hier. L’Eu­rope exige que l’I­tal­ie agisse. L’I­tal­ie annonce qu’elle achem­ine les nouveaux-venus.

Ce qui sur­prend ce n’est pas tant que les hommes poli­tiques veuil­lent obtenir et con­serv­er le pou­voir, c’est qu’ils con­sid­èrent comme pou­voir ce qu’ils obti­en­nent et conservent.

Etre sur le retour c’est val­oris­er les efforts con­sen­tis pour ren­dre aimable le résul­tat obtenu. Esclave qui chif­fonne son boulet.

A défaut de génie de Nour­rissier avant d’étein­dre et de chercher le som­meil. Aus­sitôt rêve d’une lec­ture publique : j’hésite devant la page de mon pro­pre livre, ne peux déchiffr­er les mots, les phras­es et impa­tiente le pub­lic. Je m’ex­cuse: les sit­u­a­tions sont dess­inées et il me faut inter­préter chaque dessin pour saisir le sens général. Réponse incon­sciente à la syn­taxe en cir­con­lo­cu­tions de Nourrissier.

Des mil­liers de francs dépen­sés — dix, vingt, plus — et des vendeurs tou­jours secs, arro­gants, las.

Equer­rage de la salle de bains. Brouil­lé avec la math­é­ma­tique, ce depuis mes 12 ans. Le plom­bier et le chauffag­iste, per­plex­es après que j’ai sig­nalé une cloi­son asymétrique, cherchent l’er­reur. Cherchent à la théoris­er. Nous dessi­nons au sol, con­tre les murs. Ils pré­ten­dent que j’ai tort, je tiens bon. En fin de compte, par le raison­nement, nous trou­vons 20 cen­timètres d’ou­ver­ture à rectifier.

Du sud de la France, du moins à ce qu’elle pré­tend, Gala m’en­voie sur le portable de brefs mes­sages déli­rants et bâclés où je suis traité d’ ”igno­ble”.

Les Roumains (bien qu’il y ait deux polon­ais dans la nou­velle équipe). Depuis qu’ils savent quel salaire je paie à l’heure, en plus de tra­vailler avec force, énergie et déci­sion, tra­vail­lent le sourire aux lèvres. A ce prix-là, ils démoli­raient la mai­son pour le plaisir de la recon­stru­ire. Les chantiers que je désigne (crépi, chape, murets, march­es, dal­lage, pein­ture…) sus­ci­tent une réponse invari­able: “pas de prob­lème”. De fait, comme je m’ab­sente pour répon­dre au télé­phone, les voici à l’oeu­vre. Débar­qués d’une petite auto same­di matin à 8h30, repar­tis ce dimanche à qua­torze heures, ils ont cumulé 45 heures de tra­vail. La semaine ils font leurs 50 heures dans le bâti­ment, le week-end ils trans­for­ment ma mai­son en palais rustique.